Localisation : Yonne nord (La Bourgogne du miel, pas du vin)
Bembix rostrata ?
Messagepar MoineauDeParis »
Patrick_B a écrit :Le tout c'est de garder une bonne démarche.
Mais pour la garder, il faut l'acquérir.
Jusqu'à maintenant, et depuis que je me suis lancé dans l'aventure en 2003, grosso modo, j'ai "dégrossi" au mieux, avec quelques bouquins de vulgarisation qui m'ont parfois trompé en ne présentant que les espèces censées être les plus communes. Quelques visiteurs éclairés de mon site ont eu la gentillesse - et il y en a parmi vous - de corriger mes erreurs ou approximation, parfois même de confirmer mes résultats .
C'est à ce jeu là que j'ai commencé à mesurer l'étendue des connaissances qu'il fallait aborder. J'ai commencé à empiler les livres un peu plus spécialisés mais qui restent des ouvrages plus ou moins grand public pour la plupart. Déjà là, je m'y perds un peu et quand je croise avec des sites comme les vôtres, avec celui d'Alain Ramel ou d'André Lequet par exemple... je me noie souvent encore un peu plus et finalement me trouve obligé de solliciter un avis pour sortir du gouffre.
Pour moi un entomo c'était quelqu'un qui étudiait les insectes... avant de me rendre compte que certains ont passé une partie de leur vie sur un ordre, une famille, voire moins... et qu'ils avaient déjà là de quoi s'arracher les cheveux !
Je reste modeste et conscient de mes limites - surtout que des cheveux, je n'en ai plus beaucoup - et ne serai jamais un expert ni même un "bon". Je suis un "touche à tout", et ce n'est pas péjoratif, je suis curieux de tout et suis donc obligé de survoler. D'ailleurs la majorité de mes photos sont faites en billebaude, simple témoignage des rencontres d'un instant.
Je suis donc preneur de toute méthodologie qui me permettrait d'être plus efficace. Si vous avez élaboré quelque chose ou si vous avez des pistes à me fournir, je lirai ça avec intérêt.
Je partage aussi volontiers ma grande ignorance que mes modestes connaissances
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Bembix rostrata ?
Messagepar MoineauDeParis »
Rapha1 a écrit :Conformément au réglement du forum, Il faudrait rajouter [...] la taille en mm (voir estimé)
Oui, j'avais bien noté ce principe, mais très honnêtement, je traite mes photos selon mes maigres disponibilités, elles datent de cet été, et je n'ai pas la _bonne_ idée de mesurer systématiquement mes bestioles sur le terrain ... je tâcherai de me soigner à l'avenir. Donc mettre une taille maintenant, même évaluée (à une louche près, au gré de mes souvenirs), reviendrait à mettre la taille moyenne estimée de l'espèce uniquement pour respecter le règlement, et ce serait tricher... je préfère être incomplet, mais honnête.
Je partage aussi volontiers ma grande ignorance que mes modestes connaissances
La méthodologie, effectivement, il faut l'acquérir. Rien de compliqué ni de savant, mais une accumulation de choses simples.
Le minimum, que ce soit pour une photo ou un insecte capturé, ce sont lieu et date. Le type de milieu est généralement utile (ici, c'est le cas), la proie pour les prédateurs, la plante hôte pour les phytophages... Pour les photos, il faut effectivement prendre l'habitude d'évaluer la taille. différents moyens pour ça.
- Mesurer la fleur ou un élément du décor sur lequel était posée la bête.
- Photographier en même temps à la même distance un objet dont on connait la taille (pas possible pour les hyménos en général)
- Photographier a posteriori, à la même distance et même réglage, un objet dont on connait la taille posé à l'emplacement où était la bestiole.
- Faire une comparaison visuelle avec une bestiole dont on connait précisément la taille (une abeille, par exemple), et ainsi estimer une taille en mm.
- Stade suivant: on finit par prendre l'habitude et avoir une bonne estimation instinctive. toutefois, il faut savoir que l'on a toujours tendance à surestimer les bestiole agitées ou rapides.
Autre chose simple dont on fait l'expérience ici: Les mâles et les femelles d'une même espèce peuvent tout naturellement se trouver en même temps sur un même site. Parfois, comme ici (et le plus souvent), ils sont assez semblables pour qu'un œil de débutant les confonde, mais suffisamment différents pour que les caractères spécifiques de l'un ne puisse s'appliquer à l'autre.
Pour certains genre (je pense aux Trypoxylons ), on peut trouver 4 ou 5 espèces dans un rayon de quelques mètres, et il faut de très bon yeux pour savoir sur le terrain que ce sont des espèces différentes. Pour les Bembix, l'exemple que je t'ai donné (dunes des Girauds-Faures) est un cas extrême, mais on doit pouvoir trouver quelques dunes littorales avec trois espèces différentes de Bembix se côtoyant.
Donc, attention à ne pas mélanger les photos.
Ici, les antennes dont les funicules sont entièrement noirs nous indiquent Bembix tarsata Latreille 1809, dont le mâle a des tarses antérieurs bien particuliers, non visibles sur la photo. d'autres caractères non donnés dans la clé renforce cette diagnose: Le lobe pronotal très largement jaune (généralement entièrement noir chez rostrata), et puis, sur ces photos en vue latérale, la très courte pilosité brun assez foncé du mesonotum. Chez rostrata, elle est un peu plus longue et plus claire. (Ce caractère n'est pas visible en vue de dessus, car on est perpendiculaire aux poils et on voit beaucoup plus le tégument noir)
Un autre est ici important : Le milieu. En chemin forestier, on trouvera plutôt tarsata. rostrata a besoin de vrai sable et de milieux ouverts, il est très abondant sur les dunes littorales et les pelouses à corynéphores de bord de rivières ainsi que sur les (très rares)dunes fossiles. oculata est lui aussi très psammophile, mais tout de même un peu moins exigeant. On peut trouver exceptionnellement tarsata avec eux, comme au Girauds-Faures, mais ce n'est pas son habitat privilégié.
Pour l'instant, je te passe les espèces strictement littorales ainsi que Bembix sinuata des garrigues méridionales.
Si déjà tu connais bien tarsata, rostrata, oculata, c'est l'immense majorité des individus de Bembix en France.
Pour la méthodologie, je passe sur les erreurs de débutants (que tu ne semble pas commettre), qui provoquent par la suite un blocage : Vouloir mettre un nom français sur les bestioles ! 99% des insectes n'ont pas de nom français et dans les 1% qui restent, la plupart ne sont que des noms inventés par la suite par traduction du binôme linéen. Il vaut mieux prendre l'habitude dés le début d'utiliser les noms latins.
Autre erreur : Penser qu'on peut tout identifier sur photo. En effet, sans parler des bestioles très compliquées pour lesquelles c'est difficile même sous bino, les photos ne montrant pas de relief et ne permettant pas de voir sous tous les angles sont parfois insuffisantes, ou pire, trompeuses. Exemple ici, je suis persuadé que les antennes sont bien noires, mais sous la bino, j'aurais retourné la bestiole pour être certain de voir la face inférieure. Curieusement, il y a des bestioles très rares facile à reconnaitre, et des communes impossibles à différencier sur photo, même excellente.
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Bembix rostrata ?
Messagepar MoineauDeParis »
Tout d'abord un grand, grand, grand MERCI pour ces longues et généreuses explications. Pour diminuer ma culpabilité à te prendre autant de temps, je me dirai que tout ça servira évidemment à d'autres !
Je vais donc corriger ma page en conséquence (et j'éditerai mes posts en conséquence pour que les images ne soient pas cassées). Je reprendrai les explications reçues ici en en citant la source, sauf indication contraire de votre part à tous.
Au-delà de la satisfaction de mettre le bon nom sur la bête, ce qui évitera à mes visiteurs d'être induits en erreurs, j'ai apprécié l'exercice, même si, comme je l'ai dit dans un précédent message, la somme d'information soudaine m'a un peu maintenue dans la confusion... la connaissance ne vient pas en un jour...
Pour ce qui est de la méthode :
- je note effectivement toujours le lieu, la date et la période de la journée sont connues par les données Exif.
- la plante hôte ??? je suis encore plus nul dans ce domaine que dans tout autre... je penserai néanmoins à défaut à prendre un plan large pour évaluer a posteriori.
- le milieu, généralement je m'en sors mais là aussi un plan large peut aider... car je manque certainement de rigueur pour décrire dans les règles.
- la taille... je crois que je vais mettre un bout de réglet dans mon sac photo, et penser à photographier celui-ci sur l'emplacement de la bestiole, une fois celle-ci partie, ce qui est toujours le cas à de rares exceptions près !
- photo sous tous les angles, ça, va falloir faire passer l'info chez les petites bêtes et leur demander un peu de patience et de collaboration... en effet je me suis posé comme condition de ne prendre que des photos sur le vif sans manipulation (donc j'oublie la bino), justement parce que c'est pour moi avant tout de la photo et non pas de l'étude (même si à force je me prends au jeu ou que je participe à quelques enquêtes ouvertes au public). Il me faudra me contenter des vues obtenues et tant pis si la détermination n'est pas possible. Je tâcherai quand même de multiplier les photos en variant les angles le plus possible et ceci sur le MÊME individu, j'ai bien compris la leçon .
- pour le nom de la bestiole, effectivement je m'en tiens d'abord au binôme linéen, c'est de toute façon la seule manière de savoir de quoi on parle dès qu'il y a échange d'information. Quand il existe un nom vernaculaire communément admis, je le mentionne, car pour le grand public (cible privilégiée a priori de mon site) c'est quand même plus parlant.
- détermination sur photo : il y a déjà très longtemps que j'ai compris que ce n'était pas toujours (voire pas souvent) possible, qu'au mieux on arrivait à un résultat probable. C'est d'ailleurs une mention que je suis en train d'ajouter sur mon site : détermination certaine, probable ou incertaine. Les bestioles fortement indéterminées se retrouvent pour leur part dans une galerie des inconnus de leur ordre, voire dans une galerie des inconnus tout court ! Et là place aux experts qui peuvent tenter d'améliorer le classement. Je fais alors part de toutes les remarques que j'ai reçues et je ne reclasse la bêbête qu'après avoir pu croiser toutes les infos pour garantir au mieux ce classement.
Encore un grand merci à tous pour votre accueil et vos explications.
Je partage aussi volontiers ma grande ignorance que mes modestes connaissances
Pour la plante hôte, quand ça a une importance, la bestiole est dessus: Il suffit de prendre une deuxième photo avec un plan plus large (ça pourra aussi te servir a estimer la taille si tu mesures une fleur ou une feuille)
Pour les hyménoptères prédateur, ça n'a pas d'importance. Par contre pour les hyménoptères fouisseurs, la nature du sol a son importance, et plus généralement, pour presque tous, l'environnement immédiat a son importance. Pas la peine de connaitre les termes savants, très souvent mal employés, car un coteau n'est pas thermo-xérophile, c'est la végétation qui est dessus qui peut être affublée de ce terme, le coteau lui, il est tout simplement chaud et sec. Il en va de même pour la plupart de ces termes grec qui ne manquaient absolument pas aux auteurs du 18ème pourtant plus descriptifs que les auteurs actuels.
Ce que tu avais écrit m'était suffisant pour penser à tarsata avant même d'examiner la photo attentivement. Le plus important n'est pas d'employer un langage savant, mais d'employer un langage clair et précis, et si possible agréable et compréhensible par le plus grand nombre sans ambiguïté. Les mots grecs ou anglais, les abréviations exagérément hermétiques ne sont à utiliser dans un texte que lorsque l'on a épuisé toutes les ressources de notre langue.