Bonsoir,
Bien que nous n'ayons que deux espèces en France, et une troisième dont il nous faut tenir compte ici (
A. muralis Bertkau, 1890 est considérée comme étant potentiellement présente en France -comm. pers. de collègues qui ont une étude en cours sur ces mygales, à laquelle j'ai d'ailleurs très modestement participé en identifiant des
Atypus dans mon ancienne région-), c'est loin d'être simple d'identifier une
Atypus sans examiner l'individu sous bino.
Le problème principal vient du fait que comme pour d'autres mygalomorphes français, les critères retenus pour la séparation sont quelques peu variables ce qui rend l'identification peu aisée (il suffit de s'essayer à la détermination de nos
Nemesia pour s'en rendre compte). Il faut garder particulièrement du recul vis-à-vis de l'ouvrage de Simon car ce dernier a pas mal pris de critères basés sur les armatures du corps et/ou des
appendices de certaines espèces, alors que parfois les critères retenus se chevauchent allègrement entre deux espèces proches (principalement chez
Nemesia) Pour ma part, pour en revenir aux
Atypus, je pense que les critères les plus probants sont, dans l'ordre :
-
les filières, dans les cas typiques , composées de:
-3 articles de longueur sub-égale chez
Atypus affinis
-3 articles de longueur inégale (l'article
apical étant bcp plus long que le précédent, contrairement à
affinis) chez
A. piceus
-4 articles chez
A. muralis.
Comme rien n'est jamais simple chez les arthropodes

, il s'avère qu'à de rares occasions (jamais vu de mes propres yeux), selon certains auteurs (il faudrait que je retrouve qui dans ma biblio), on puisse observer des
Atypus piceus possédant 4 articles aux
filières postérieures, ce qui les rapproche évidemment de
muralis. Cependant, si ma mémoire est bonne, il me semble qu'il s'agit plus à proprement parler d'une division reliquaire chez
piceus, que d'un véritable article fonctionnel tel qu'il existe chez
muralis, ce qui implique qu'en théorie, en comparant un spécimen de chaque espèce côte-à-côte sous bino, ceci devrait se voir plus ou moins. Bref, pas simple quand même.
-
les denticulations des chélicères :
C'est assez valable pour séparer affinis/piceus : toutes les dents de la marge inférieure des
chélicères d'
affinis sont longues et sub-égales, tandis qu'elles sont alternativement (alternance irrégulière) petites et longues chez
piceus. Ce qui est dommage, c'est qu'à ma connaissance, personne n'ait pensé à les observer ou tout au moins à relater leur aspect chez
muralis, même si c'était pour dire qu'elles étaient comme celles de l'une ou l'autre espèce...!
-
les spermathèques :
Probablement le critère le plus valable pour identifier
A. piceus, qui est notablement différente sur ce point des deux autres ! Ceci dit, pour avoir fait personnellement la manip' sur quelques spécimens d'
affinis et
piceus , c'est très, très ch... et délicat à faire, donc peu commode et inutile pour tenter une identif' d'après photos car cela implique dissections et prépa microscopiques. Je n'avais par contre jamais vu les spermathèques de
muralis, merci pour le lien

!
-Un critère non mentionné ici mais qui est de toute façon peu aisé à interpréter : la disposition et taille des
ocelles. Il y aurait quelques petites différences entre
piceus et
affinis sur ce point, mais ceci semble si minime à l'observation que franchement, ça me semblerait peu valide de trop s'appuyer sur un tel critère. Je n'ai d'ailleurs pas mémorisé les différences en question... je crois que SIMON (1914), entre autres, en fait état dans "les Arachnides de France".
-
Les bulbes copulateurs des mâles :
Oui mais

délicat car dans ROBERTS (1995) par exemple, ils sont représentés sous un angle précis ce qui signifie que si on a pas l'extrémité du
pédipalpe en question dans la
bonne position et inclinaison sous les yeux c'est quasiment impossible de se servir de ce critère sans qu'il y ait confusion. A plus forte raison quand les bulbes se ressemblent déjà pas mal comme c'est le cas chez
Atypus...!
J'avoue pour ma part que pour celles qui en ont (malheureusement les mygalomorphes ont été mal dotées sur ce point

, les femelles sont seulement pourvues d'un sillon épigastrique très "simple"), les
entélégynes en l'occurence, l'observation des
épigynes femelles est bien plus convaincante que celle des bulbes de leurs mâles, sauf quand ces derniers possèdent réellement des différences flagrantes avec ceux d'autres espèces proches. D'ailleurs un sondage à ce sujet : qu'en pensez-vous ?
A noter enfin que
piceus semble affectionner plus spécialement le nord-est de la France et les pays frontaliers orientaux et septentrionaux,
affinis semble assez largement répartie en France et ailleurs, et
muralis, comme il a été cité plus haut (et dans FE et diverses publi) !
piceus semble être souvent trouvée sur les pelouses sèches, pentues et exposées au sud (du moins ds le N-E de la France),
affinis apprécie entre autres les forêts à sol sableux, et
muralis ?? aucune idée des préférences éco.
Donc finalement, malgré la localisation qui ne correspond guère -à ce que j'en connais, tout au moins- il pourrait s'agir d'un spécimen
piceus à
filières "quadri-divisées", hypothèse bien sûr très hypothétique !
Voilà, ce n'est qu'un avis parmi d'autres qui soulève sûrement plus de questions qu'il n'apporte de réponses; l'avis d'un spécialiste serait le bienvenu (je tâcherais de poser la question des critères déterminants lors d'une de mes prochaines excursions parisiennes rue Buffon, les arachnologistes sont situés juste en face de la myriapodologie

).
Bien cordialement,
Etienne