Question sur Mesostigmata et Trombidiformes

[Zétrik]

Bonjour,
J'en appelle à votre savoir !

Je participe à une étude visant à caractériser le régime alimentaire de quelques espèces d'oiseaux paludicoles. Des sessions de captures ont permis de récupérer des piafs et nous les avons fait déféquer. L’ADN des proies situées dans ces fèces a été amplifié par PCR et nous avons dressé pour chaque espèce d'oiseau, une liste relativement précise des invertébrés consommés.

Dans environ une fiente sur deux chez chaque espèce d'oiseau étudiée, nous trouvons des Mesostigmata et des Trombidiformes. Je doute qu'il s'agisse là de proies consommées de façon volontaire par les oiseaux.

- Pouvez-vous me confirmer le caractère phorétique des Mesostigmata, et si oui est-il généralisé à l'ensemble des espèces de ce groupe?
-J'ai lu que les Trombidiformes parasitent les invertébrés mais seulement au stade larvaire. Est-ce confirmable ? Et si oui, où puis-je trouver quelques réf ou info précises ?

Voilà en gros, en l'état actuel des résultats nous pourrions penser que ces acariens représentent une ressource trophique primordiale pour ces oiseaux vu le nombre de présence dans les fientes mais je pense plutôt qu'ils sont ingérés de façon fortuite lorsqu'ils consomment d'autres invertébrés. Mais n'étant pas un spécialiste en acarien, je serai heureux d'avoir des infos.

[pierred]

Belle problématique.

[Tifaeris]

Bonjour,

Intéressant !
De quelles espèces d'oiseaux il est question ? Je suis curieuse de savoir comment vous les faites déféquer, en patientant simplement peut-être ?

Je ne suis pas réellement spécialiste, mais s'il y a des Mesostigmates et des Trombidiformes dans une fiente sur deux, il y a de fortes chances en effet qu'ils ne soient pas ingérés volontairement vu la taille des bestioles. Certains peuvent à la limite être visibles et intéressants pour de petits passereaux, mais bien loin d'être une proie consommée volontairement de manière régulière (en tout cas je pense).

La majorité des Mesostigmates sont des prédateurs libres, mais beaucoup d'autres sont parasites ou symbiotes de mammifères, oiseaux, reptiles ou arthropodes. Certains se nourrissent aussi de champignons ou de nectar, mais ils sont minoritaires. Finalement on peut en trouver un peu partout, dans le sol, le bois mort, les cadavres, les nids, et bien sur sur d'autres animaux vivants.

Les Trombidiformes sont aussi très diversifiés, puisqu'ils vivent, sur terre, en eau douce ou dans la mer. Ils peuvent être prédateurs, phytophages, saprophages, paraphages ou parasites.

Mesostigmates comme Trombidiformes peuvent pratiquer la phorésie.

Pour ce qui est du parasitisme au stade larvaire uniquement (sur vertébrés et invertébrés), ça concerne la cohorte des Parasitengonina, dont les adultes sont prédateurs. Il y a beaucoup de familles dans cette cohorte (voir ici dans la classification) ! On peut en trouver sur beaucoup d'arthropodes dont les oiseux se nourrissent. Il y a des informations sur les divers hôtes ici mais uniquement pour la famille des Trombidiidae.

Les Pterygosomatidae sont parasites aussi (larves et adultes) mais pas présents en Europe je crois.

Il y a quelques informations intéressantes ici ici (mais pas trop mal détaillé quand même).

Sinon, il y a le Krantz and Walter, détaillé pour tous les acariens (mais pas au-delà de la famille).

Pour de la doc plus précise, je ne sais pas trop

[Zétrik]

Ah super ! Je vais prendre connaissance de vos liens

La problématique de base repose sur une meilleure appréciation des modifications liées au changement climatiques que subissent les roselières actuellement. Assecs répétés, déconnexion hydrologique, taux de salinité croissant, menaces anthropiques....
En plus du volet génétique par Métabarcoding de fèces, nous avons échantillonné les invertébrés sur différents sites toute l'année et en avons estimé la biomasse à l'aide d'équation de réduction taille/poids. La comparaison des résultats de ces deux volets permet de voir -par exemple- que certains groupes taxonomiques pourtant bien présents ne sont pas consommés. Le volet génétique permet d'évaluer qualitativement quels taxons sont consommés, pour chaque espèces de piafs, de comparer entre elles leur régime alimentaire et leurs préférences.... Mais les résultats sont de l'ordre absence/présence dans la fiente.
L'autre volet d’échantillonnage entomo, réalisé par piégeage à proximité des lieux de captures des oiseaux permet lui de quantifier cette ressource trophique, pour chaque ordre, famille, espèces d'invertébrés en présence en termes d'effectifs et de biomasse.
Les résultats sont étonnant et passionnant.

Du coup l'étude s'est portée sur les 4 espèces sédentaires et emblématiques de ces milieux : la Panure à moustache, la Bouscarle de Cetti, le Bruant des roseaux et la Lusciniole à moustache. Une fois extrait des filets, les oiseaux sont déposés dans un sac en papier dans lequel est placé au fond une assiette surmontée d’un grillage . Cette technique empêche l’oiseau de rentrer en contact avec les matières fécales qui tombe sur l’assiette, l’oiseau y est laissé 3 à 4 minutes le temps qu’il défèque pour être ensuite relâché.

Les populations de ces oiseaux dégringolent de façon alarmante. A termes, nous espérons pouvoir anticiper par des mesures de gestions adaptées la capacité d’accueil de ces roselières face aux menaces climatiques et anthropiques et freiner l'impact de ces dernières.

[Tifaeris]

Oh j'adore les panures !
Je vais les voir tous les ans du côté de Capestang et du Castélou près de Narbonne.
C'est vrai que tous ces milieux humides sont vraiment menacés... et avec eux la faune et flore qui y vit. J'espère vraiment que ce genre d'études permettra de mieux les protéger.

Au cas où, il y a d'autres liens sur les acariens sur cette page.

[Zétrik]

Capestang était complètement asséché cette année !

[Tifaeris]

Oh mince
J'y suis passée fin mars ça allait mais j'imagine qu'en été ça souffre beaucoup, de plus en plus ...